Heu c'est une blague??
Critique du Figaro...
Le nouvel Astérix et Obélix est enlevé, fin et subtil
NOTRE CRITIQUE - Nous avons vu Astérix et Obélix au service de sa Majesté. Il renoue enfin avec la version d'Alain Chabat et fait oublier le pitoyable Astérix aux Jeux olympiques.
Quatre ans après le décevant Astérix aux Jeux olympiques, on n'était plus très sûr de vouloir revoir Astérix et Obélix revivre de nouvelles aventures sur grand écran. On préférait rester sur la petite merveille d'équilibre concoctée par Alain Chabat il y a dix ans déjà: Astérix et Obélix: mission Cléopâtre.
Pourtant, on s'était repris à espérer à l'annonce d'un radical changement d'équipe. Laurent Tirard, auréolé du succès du Petit Nicolas, relevait un nouveau défi. Banco!
À l'arrivée, on sort de ce quatrième film l'esprit léger, avec un grand sourire de satisfaction. Plus enlevé, plus subtil, et plus élégant que le précédent, Astérix et Obélix au service de sa Majesté a su retrouver le secret de la potion magique de Chabat. Une pincée d'autodérision, un soupçon d'humour potache, une lampée d'action, le tout saupoudré d'un humour référentiel, mais jamais lourdingue.
Astérix traverse la Manche
L'histoire reprend l'intrigue de deux albums de la série: Astérix chez les Bretons et Astérix et les Normands tous deux parus en 1966. D'un côté Jules César (jubilatoire Fabrice Luchini) ambitionne de conquérir la Bretagne, et finit par assiéger le village de la Reine des Bretons (incarnée par notre Catherine Deneuve nationale, avec beaucoup de flegme) avec ses cohortes de romains.
De l'autre, au sein de notre cher village gaulois, Astérix et Obélix sont chargés de veiller sur le jeune Goudurix (Vincent Lacoste, plus «bogosse» que jamais) jusqu'à l'arrivée de Jolitorax (Guillaume Gallienne, qui attire une fois de plus à lui tous les lauriers) envoyé par la reine des Bretons pour récupérer de la «magique potion» seule capable de sauver son île des assauts romains.
La mission d'Astérix et Obélix est simple: accompagner jusqu'en Angleterre un tonneau de potion magique destiné à renverser la situation. Dans leur bagages, nos deux héros prennent le jeune Goudurix, tout en laissant Idéfix garder la maison.
Où l'on se rend compte que plus Astérix et Obélix quittent rapidement leur village, meilleur est le film!
En réalisateur roué, Laurent Tirard a mis tous les bons ingrédients de son côté. Il s'amuse avec l'accent anglais des personnages, construit son histoire autour des meilleurs gags des deux albums: le tournoi des cinq tribus, la visite à Londinium où les Beatles sont des bardes très populaires, sans oublier le sempiternel «five o'clock tea».
Un casting de premier choix
Tirard offre également des moments de bravoure comique à chaque second rôle, qu'il s'agisse de Dany Boon et Bouli Lanners en Normands bas du front, de Valérie Lemercier métamorphosée en Miss Macintosh, de Jean Rochefort en sénateur romain chargé d'un audit sur les coûteuses conquêtes de César… ou de Gérard Jugnot en capitaine pirate, qui trouve là une belle revanche (c'est en effet lui qui devait initialement réaliser le 3e film).
Le tout donne un film bon enfant, dominé par un casting de premier choix, où l'on devine que les acteurs ont pris beaucoup de plaisir à jouer tous ensemble.
En première ligne le tandem Depardieu-Baer: ces deux-là revisitent avec un mélange étonnant de sincérité et d'humour la relation Astérix-Obélix: à quoi tient finalement cette drôle d'amitié entre deux Gaulois qui vivent ensemble sous le même toit en compagnie d'un petit chien baptisé Idéfix?
Le film offre enfin l'occasion de donner un réponse à ce mystère qui n'a nul besoin de justification dans les albums d'Albert Uderzo et René Goscinny, mais qui, dès qu'il franchit le cap de la bande dessinée pour s'animer à l'écran, suscite tout de même certaines interrogations.
Édouard Baer enfile les braies d'Astérix avec une aisance admirable. Même s'il n'exploite pas assez le côté colérique du personnage créé par Uderzo/Goscinny, il apporte à l'irréductible petit personnage une profondeur et un humour désinvolte qui le rende tout de suite très attachant.
Bien sûr, on éprouve beaucoup de plaisir à retrouver Gérard Depardieu en Obélix. Et l'on sait dès les premières séquences que le tandem qu'il forme avec Édouard Baer va fonctionner: l'alchimie entre les deux comédiens est évidente. Cette belle complicité permet aux autres acteurs d'entrer sans effort dans leur univers et leur délire.
Car avant tout, Astérix et Obélix, c'est un peu notre «Amicalement vôtre à la gauloise». Comme chacun sait, Brett Sinclair et Dany Wilde étaient au service de sa Majesté.
Tirard aura également su tirer son film vers un second degré et des gags plus référentiels en résonance avec l'actualité ou les faits de société (les sans-papyrus raccompagnés à la frontière, le jeune Goudurix qui passe deux heures à se coiffer avec «effet décoiffé») etc.
Enfin, alors qu'on craignait que la 3D du film soit un attrape-gogo donnant mal à la tête, il faut bien reconnaître qu'à certains moments choisis, elle apporte un effet de réel assez convaincant.
Bref, on craignait sérieusement que le ciel tombe sur la tête de cette 4e aventure. Il n'en est rien. Même si l'ensemble du film subit quelques trous d'air en terme de rythme, il se regarde avec beaucoup de plaisir.